still life
Si tranquille. Où sont... ? Et soudain l'espace s'est empli de silence. Le vide s'est établi, le vide s'est montré. Il était comme l'air qui occupe notre espace sans qu'on le remarque, et qui passe même à travers nos corps
comme le soleil quand il règne sur les journées
comme la nuit, elle aussi envahissement total
soudain nous avions les oreilles, le corps, les pensées pénétrés
l'espace, tout était noyé de ce vide plein
les mots s'étaient tus. Avais-je même fini ma phrase lorsque c'est arrivé ? Cela était si fort que je restai sans voix, sans idées, sans volonté, sans crainte, sans désir. Tout s'était vidé de moi, était rassemblé là. Mots inutiles dans cet instant prolongé où rien n'était à faire car tout se faisait. Rien n'était à dire dans ce tout disant. Still life. Se retirer pour que la vie soit tranquille.
Il n'y a pas de mots pour que soit ce vide.
Les mots sont l'intervention. L'interruption. L'interdiction. L'imprécation. La prise de parole. Le bouleversement. Le combat. L'intranquillité.
Mais le vieil homme continue, il écrit. Ce n'est pas lui qui écrit mais son corps, sa tête lourde de chair et de regard rentré, couronnée de barbe et de cheveux blancs, sa grosse main qui tient le stylo, l'autre soutenant sa tempe, le sang qui afflue à sa peau. Le silence écrit, entre ses lunettes cerclées de métal doré et son chandail de laine bleue.