parole... parole
C'est un drôle de grain que la parole, tout de même – pas toujours le beau grain des mots ou de la voix chers à Roland Barthes – mais le grain de nos tiges frêles ou tremblantes lorsque le désir nous fait vaciller, nous trouble, remue nos racines mal assurées, mal connues, et là le grain que nous donnons à moudre comment est-il ? vert... rouge... sec... assoiffé... déséquilibré... mal formé... avorté ?
Il suffit par exemple qu'elle ne soit pas là, au téléphone, que vous déposiez un message sur son répondeur, en face de celle qui n'est pas, de celle qu'elle n'est pas, juste là, dans l'inconnu, dans l'inconnue, vous déposez votre trop connu, trop connu d'elle puisque calqué sur elle, mais elle manque, et vous n'êtes plus qu'un calque sans modèle. Votre voix est une drôle de parole, votre voix n'est plus que l'enveloppe à chiffonner, que le son déjà moulu.
Le grain a failli. Le grain est tombé en faille.
La parole reste sur le chantier de l'Autre. Elle lève dans les fissures. C'est cela l'analyse.